Doom, le jeu vidéo culte de id Software, adapté en bande dessinée ? C’est bel et bien arrivé, en 1996, donnant ainsi naissance à l’un des comics promotionnels les plus décomplexés que je connaisse. Un comic book en mode cauchemar, pas fait pour la bleusaille !
À moins que vous n’ayez vécu dans une grotte ces trente dernières années, vous connaissez forcément Doom !
Sorti en 1993, le jeu de tir à la première personne de id Software est sans conteste l’un des jeux vidéo les plus populaires de tous les temps ! Porté sur pratiquement toutes les machines de sa sortie à nos jours, il est emblématique du genre FPS, au point que l’on a longtemps appelé ses héritiers des Doom-Like. Fruit du travail de John Romero, John Carmack et de leurs équipes, il est aussi l’un des plus célèbres représentants de la technologie du shareware, l’un des pionniers des jeux multijoueur sur PC, et fédère, encore aujourd’hui, une importante communauté de joueurs et de moddeurs partout à travers le monde. Outre ses adaptations sur absolument toutes les consoles sorties depuis trois décennies et ses nombreuses suites et variantes, officielles ou non, le jeu est également célèbre pour ses portages incongrus sur des objets du quotidien : test de grossesse, calculatrices, appareil médical utilisé pour réaliser des échographies, et même distributeur de billets de banque, rien ni personne n’échappe à Doom !
Vous mettant dans la peau d’un space marine anonyme, appelé Doomguy dans les premiers épisodes ou Doom Slayer plus récemment, mais identifié sous le nom de Flynn Taggart dans les romans inspirés des jeux, il vous propose de chasser des hordes de démons sur la planète Mars et ses lunes ! Dans le premier opus, l’histoire derrière le jeu est principalement prétexte à défourailler des monstres à grands coups de shotgun et de tronçonneuse, ce qui participera sans aucun doute à la réputation sulfureuse et à la promotion de Doom à sa sortie !
Si le lore de la licence sera largement développé par la suite, notamment dans le reboot de 2016 et dans sa suite, Doom Eternal, la popularité de la franchise durant ses premières années d’existence tient avant tout à son univers de science-fiction gore, à ses graphismes percutants et à son gameplay novateur ; ce qui fait déjà une belle liste de points forts.
En tant que jeune joueur de jeu vidéo dans les années 1990, Doom a été une claque pour moi lorsque je l’ai découvert sur Super Nintendo ! Une claque qui s’est rapidement transformée en référence, tant en matière de jeu vidéo que de Pop Culture. Doom compte toujours parmi les jeux les plus marquants auxquels j’ai pu jouer dans ma vie, ce qui a poussé le fan de comics que je suis à se poser la question suivante : existe-t-il des comics inspirés de l’univers du jeu de id Software ?
Et bien, il existe effectivement un comic book tiré de la franchise, un seul et unique comic book de seize pages, publié en 1996 et distribué gratuitement par l’éditeur GT Interactive lors de l’E3 de Los Angeles, et peut-être aussi pendant la QuakeCon de cette même année. En raison de sa rareté et de sa qualité souvent discutée, ce comic book a été totalement mis de côté, et même oublié, par une bonne partie des fans pendant de nombreuses années, avant d’être déterré par des sites spécialisés comme PlanetQuake et Doomworld, au début des années 2000.
Ce one-shot s'ouvre sur une scène assez hallucinée dans laquelle un Marine en mode Berserker arrache la colonne vertébrale d’un démon. Prenant un peu trop la confiance, il s’attaque à mains nues à un Cyberdémon, bien plus gros, avant de réaliser que l’effet du Berserker s’estompe et qu’il va lui falloir un flingue… Un très gros flingue !
Il met ensuite la main sur une tronçonneuse et tranche la tête de quelques zombies, à qui il va dérober un fusil à pompe, qu’il utilisera finalement comme lampe-torche afin d’avancer dans une pièce plongée dans le noir et infestée de créatures démoniaques !
Il récupère alors une mitrailleuse, ou chaingun, et réduit de nouveau en pièces quelques monstres, avant de s’approprier un fusil à plasma avec lequel il va tout faire sauter en tirant sur des fûts explosifs !
Notre héros débarque ensuite dans une pièce où se déroule un véritable carnage ! C’est là qu’il aperçoit l’objet de sa convoitise, le fameux Big Fucking Gun, ou BFG, qui lui permettra de faire le ménage ! Retenant difficilement quelques larmes de joie, il s’empare de l’arme et retourne rendre visite au Cyberdémon apparu en début d’épisode pour lui régler son compte.
Si l’histoire semble simpliste et expédiée, son rythme frénétique, pour ne pas dire bordélique, colle plutôt bien à l’esprit du jeu : ça va à cent à l’heure, des morceaux de bidoche volent dans tous les sens, et le space marine n’a pas le temps de discuter avec ses adversaires qui, de toute façon, ne sont pas là pour ça… Bref, de ce point de vue, c’est plutôt fidèle à l’idée que l’on pouvait se faire de Doom en 1996.
Cela dit, l’écriture du personnage principal est très perchée ! Le Doomguy déclame aléatoirement des tirades déconcertantes et incohérentes au possible, passant d’une exaltation manifeste à des élucubrations assez profondes et absolument inattendues dans un tel contexte. Par exemple, après être tombé dans une cuve de déchets toxiques, il entreprend un long monologue à tendance écologiste sur la protection de l’environnement et l’état de la Terre que nous allons laisser à nos enfants. Son point de vue est assez juste, mais sachant qu’il fait littéralement face aux portes de l’Enfer, est-ce vraiment le moment de penser au tri sélectif ?
Le héros enchaîne les punchlines, dont certaines sont assez référencées, comme quand il lâche un petit “Groovy” à la manière de Ash dans Evil Dead, une saga comptant parmi les films qui ont inspiré les créateurs du jeu. Le reste du temps, il se contente de louer l’existence des armes à feu, jusque dans son ultime réplique affirmant que seul un gros dur avec un gros flingue pourra libérer l’univers. Certaines punchlines tirées du comics ont été réutilisées pour nommer les succès du portage de Doom II dans sa version sur Xbox Live Arcade, preuve que ces seize pages auront quand même laissé une trace dans l’histoire de la licence !
Malgré toute la sympathie que l’on peut avoir pour cette histoire bête et méchante, elle est assez hasardeuse en ce qui concerne sa partie graphique. Le dessin de Tom Grindberg est bâclé et son découpage complètement brouillon. Le scénario, signé Steve Behling et Michael Stewart, est relativement inexistant et les quelques passages qui pourraient être un tant soit peu épiques tombent à plat, par la faute d’une absence totale de suspense ou d’enjeux. Même si le rythme est plutôt fidèle à l’esprit du jeu, on fait face à un enchaînement de scènes sans queue ni tête et complètement anecdotiques. Et malgré la présence du bestiaire de la saga et des armes emblématiques, tout est un peu trop expédié pour vraiment faire kiffer les initiés. L‘ensemble est bas du front, mais aussi plutôt délirant, ce qui fait de la lecture de ce comic book une sorte d’expérience ni dénuée de fun, ni vraiment indispensable. On comprend donc assez facilement pourquoi les fans de Doom ont boudé ce comics, voire même renié son existence, pour les plus intégristes !
Il faut cependant lui reconnaître la qualité de condenser dans une courte histoire l’esprit hyper bourrin du jeu, et à ce titre, il remplit plutôt bien son rôle d’objet promotionnel. Même si, trois ans après la sortie de Doom, je doute que ce coup de pub ait été indispensable, le soft et sa suite, Doom II : Hell on Earth, jouissant déjà d’une sacrée réputation et de nombreux portages à l’époque.
Finalement, avec le temps, le désamour dont elle a été victime a fait de cette bande dessinée un objet culte. Les conditions exactes de sa distribution étant assez floues, tout comme le nombre exact d’exemplaires produits à l’origine, ce petit fascicule n’est pas évident à trouver, et il a vu sa côte s’envoler sur les sites de revente ces dernières années. La réimpression du comic book à l’occasion de la sortie du coffret id Anthology, regroupant dix-neuf jeux de l’éditeur et tiré à dix mille exemplaires, a eu le mérite de rappeler son existence aux adeptes de Doom, sans le rendre moins rare pour autant. Un troisième tirage est également présent dans l'édition collector de Doom : The Classics Collection, produite par Limited Run en 2021.
En comparaison du succès colossal qu’a pu connaître la licence de id Software depuis plus de trente ans, elle est principalement restée cantonnée à son médium d’origine : le jeu vidéo. Si on met de côté quelques romans et les deux adaptations cinématographiques largement dispensables, l’univers étendu de Doom s’est rarement développé en dehors des PC et des consoles de jeux, et la franchise n’a jamais eu les honneurs d’une série de comics à son nom. Pour l’instant.
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J'avoue... J'ai un petit faible pour le premier film DOOM, celui avec The Rock :p
(mais chuuuuut... faut pas trop l'ébruiter :p)