GENERATION X : LES JEUNES X-MEN D’IL Y A 30 ANS !
Scott Lobdell et Chris Bachalo réinventent les mutants chez Marvel Comics !
Plus forte que n'importe quelle crème miracle issue de la fallacieuse industrie cosmétique, la magie des comics garantit à nos héros de papier une jeunesse éternelle, ou presque. Mais, les ados mutants de Generation X sont-ils encore dans le coup, trois décennies après leur création ? Voici la réponse, avec l’intégrale 1994-1995, chez Panini Comics !
Welcome to the Sky Valley de Kyuss, le premier album éponyme de Korn, le Blue Album des Weezer, Burn my Eyes de Machine Head, des tubes comme Black Hole Sun de Soundgarden ou la sortie du live MTV Unplugged de Nirvana : 1994 est vraiment une très bonne année sur le plan musical, de mon point de vue.
Mais c’est aussi l’année qui marque l’arrivée chez Marvel Comics de l’équipe d’ados rebelles de Generation X, qui fête ses trente ans en 2024. L’occasion pour moi de revenir sur les débuts de cette série qui fleure bon le grunge et les sitcoms.
Au début des années 1990, alors que les X-Men sont au plus fort de leur succès, l’éditeur Bob Harras confie au scénariste Scott Lobdell la mission d’écrire une mini-série New Mutants. Cette équipe, créée par Chris Claremont et Bob McLeod en 1982, est entre-temps devenue X-Force, mais Marvel doit utiliser le titre pour en conserver les droits. Autant vous dire que protéger cette marque, en pleine “X-Mania”, est essentiel pour la Maison des Idées ! Mais Harras, malgré les impératifs commerciaux, tient à ce que le projet soit avant tout mené avec le maximum de liberté artistique possible.
Lobdell, lui, veut se réapproprier les X-Men, généreusement copiés par les autres éditeurs, Image Comics en tête. L’outsider fondé par des transfuges de Marvel a récemment battu des records de vente avec WildC.A.T.s de Jim Lee, et connaît également un certain succès avec CyberForce de Marc Silvestri et Youngblood de Rob Liefeld, des séries dont les équipes de super-héros reposent toutes sur un modèle très similaire à celui des Enfants de l’Atome. Si on ajoute Harbinger chez Valiant Comics ou Ex-Mutants chez Eternity, pour ne citer que les exemples les plus marquants, les homo-superior de Charles Xavier sont allégrement plagiés durant cette période.
Aidé du dessinateur Chris Bachalo, Scott Lobdell a pour idée de créer de nouveaux archétypes, très éloignés des standards classiques et désormais usés de Wolverine ou Colossus, qui serviront à leur tour de base aux rip-off de la concurrence pour la décennie à venir.
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Sur un marché de plus en plus concurrentiel pour la Maison des Idées, il y a aussi, à l’époque, la volonté de rationaliser l’univers des mutants et de redonner une raison d’être aux séries dérivées secondaires comme Excalibur ou aux aventures en solo de Cable. Cela passe par la mise en place d’événements s’étalant sur plusieurs mois et dans plusieurs séries : des crossovers propres aux séries estampillées “X” de Marvel, occasions idéales pour introduire de nouveaux personnages, y compris ceux qui deviendront les membres de Generation X.
En 1994, dans Le Complot Phalanx, ou Phalanx Covenant en version originale, les X-Men font face à un groupuscule anti-mutant dont les membres se sont volontairement inoculés un virus extraterrestre faisant d’eux des êtres techno-organiques. Ces fameux Phalanx enlèvent de jeunes mutants dans le but de les utiliser comme cobayes, afin de comprendre pourquoi le virus est inefficace sur ces derniers. Mais, heureusement pour les ados kidnappés, le plan des Phalanx tombe à l’eau et leurs prisonniers sont libérés grâce à la vivacité d’esprit de Sean Cassidy, alias le Hurleur.
Lobdell aime le Hurleur, qu’il considère comme sous-exploité, et va donc lui confier une mission capitale auprès de ces jeunes mutants égarés : les prendre sous son aile et les aider à devenir de futurs X-Men.
Il sera aidé par Emma Frost qui, bien qu’elle ait été une adversaire des élèves de Charles Xavier, endosse elle aussi le rôle de mentor de Generation X. Le signe d’une réelle évolution pour le personnage, qui doit se remettre en question vis-à-vis de ses décisions passées. Ses anciens étudiants, les Hellions, seraient peut-être encore en vie si elle avait fait des choix différents, et devenir professeure de ces nouveaux ados mutants est pour elle la chance de repartir sur de nouvelles bases.
Ainsi, Synch, Monet. St Croix, Husk, Skin, Chamber et Jubilee se donnent rendez-vous dans une nouvelle école située dans le Massachusetts, où ils seront bientôt rejoints par d’autres mutants comme la mystérieuse Penance. Et, comme voulu par Lobdell, ces héros et héroïnes sortent des sentiers battus par leurs prédécesseurs, les X-Men.
Monet, alias M, est l’adolescente parfaite, ce qui a le don d’insupporter ses camarades. Mais ses origines cachent de nombreux secrets, ce qui la placera au centre de plusieurs intrigues aussi bien au sein de l’équipe qu’au sein de la série elle-même.
Angelo Espinosa, alias Skin, est un ancien membre de gang que l’on croirait tout droit sorti d’un film de David Lynch. Il possède une peau à l'élasticité hors du commun, mais son étrange apparence et les maux de tête accompagnant ses pouvoirs l’empêchent de vivre une vie normale.
Chamber est le premier personnage créé par le duo d’auteurs derrière Generation X et il résume à lui seul l’esprit de la série. Jonothon Starsmore est capable d’envoyer de puissantes salves d’énergie depuis une zone s’étendant de la partie inférieure de sa mâchoire à son torse. Malheureusement pour lui, la première manifestation de son pouvoir l’a littéralement défiguré, le forçant désormais à s’exprimer uniquement par télépathie, et le privant du besoin de se nourrir, de boire, et même de respirer.
Lunatique et misanthrope, Chamber va avoir beaucoup de mal à s’intégrer à l’équipe, mais c’est aussi l’un des personnages qui aura l’une des évolutions les plus intéressantes au fil des années, et celà bien au-delà des soixante-quinze numéros que va connaître cette première version de Generation X.
Si Synch, capable de copier les mutants à proximité ; Husk, arrachant sa peau pour révéler son corps de métal, de verre ou de pierre ; et Julilee, aux pouvoirs explosifs indomptables ; sont moins marquants dans leur conception, ils participent à la dynamique de groupe très bien rodée de cette équipe d’adolescents dont les préoccupations sont totalement d’actualité.
Car, si les lieux communs entretenus par une partie du lectorat voudraient qu’il n’y ait rien d’intelligent ou de conscient dans les comic books des années 1990, comme c’était déjà le cas pour CyberForce chez Image Comics, Generation X démontre que cette idée préconçue est d’une bêtise affligeante.
Bien qu’elle ne soit pas totalement libérée des clichés, la série se place comme l’une des toutes premières productions Marvel annonçant avec conviction la sortie du Dark Age, et un tournant dans la période suivante que l’on nomme parfois Extreme Age.
Pour se détacher des tendances établies durant la décennie précédente, et encore largement dominantes, Lobdell ne pense pas sa nouvelle série comme une version “Grim & Gritty” des X-Men, et évite toute forme de jeunisme condescendant. Bien au contraire, ses héros inhumains n’ont rien du stéréotype de l’adolescent triste et candide. Mature et optimiste, cette génération MTV n’est pas aussi décérébrée que voudraient le faire croire ses détracteurs. Certes, elle aime transgresser les règles et repousser les limites établies par les adultes, mais c’est souvent pour mieux démontrer sa capacité à prendre en main son propre avenir. L’ère du “No Future” est révolue. Ce futur, il existera bel et bien, à condition que la jeune génération prenne les responsabilités qu’ont fui les précédentes. On peut donc dire que la série de Lobdell et Bachalo, en plus de ne pas mettre en scène des ados débiles, est loin de prendre ses lecteurs et ses lectrices pour des ados débiles.
Les débuts Generation X conservent cependant un ton légèrement horrifique typique des comics 90’s ; notamment à cause de vilains comme Emplate, qui absorbe l’énergie vitale des autres mutants ; et offre son lot de personnages bad-ass et de poncifs caractéristiques des histoires de super-héros mainstream de l’époque, mais en connaissance de cause. Tout comme Scream de Wes Craven, qui sortira au cinéma en 1996, la série de Lobdell et Bachalo est consciente de l’historique de son propre medium et en embrasse donc les codes pour les utiliser avec subtilité.
Après ces premiers épisodes de Generation X, les séries mutantes de Marvel se rejoignent une fois encore sous la bannière d’un nouveau crossover : Age of Apocalypse. Une excursion futuriste qui va marquer les lecteurs à l’orée de l’explosion de la bulle spéculative qui mènera Marvel aux portes de la banqueroute. Mais ceci est une autre histoire…
Generation X : L’Intégrale 1994-1995 est disponible en français chez Panini Comics !
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cette série, avec le père Chris Bachalo, dessinateur que j'avais découvert sans savoir que c'était lui sur la première série Ghost Rider 2099. Que de souvenirs.
Je ne sais pas si la série animée X-Men: Evolution s'inspire de ça ? Des dessins très années 70 ... ceci dit dans X-Men à part Wolverine alias Logan cela n'a jamais été ma tasse de thé , j'aurais bien aimé voir Wolverine chez dc dans une histoire en tant que personnage principal et pourquoi pas contre deathstroke entre autre