À l’occasion de l’arrivée de la série animée X-Men ‘97 sur Disney+, je reviens sur l’incroyable succès rencontré par les mutants de Marvel Comics durant les années 1990. Dans ce nouvel article, on va parler de l’incontournable série animée X-Men diffusée à partir de 1992 et de son colossal impact culturel !
Nous sommes en 1995. À mon retour de l’école, je me jette devant Canal+ pour regarder le dessin animé qui met en scène les X-Men, des super-héros mutants mis au ban de la société pour leur différence.
À l’époque, malgré mon jeune âge, j’ai déjà ouvert quelques comics, mais c’est assurément cette série animée qui va me faire découvrir en détails les différents mutants de Marvel et leur univers fait de combats pour la tolérance, de chocs idéologiques et de voyages temporels.
L’histoire de la série animée X-Men est intimement liée au parcours d’une femme : Margaret Loesch.
Passée par les réseaux étasuniens ABC et NBC, Margaret Loesch devient, en 1979, la vice-présidente du département des programmes pour enfants de Hanna-Barbera, célèbre société de production spécialisée dans l’animation, à qui l’on doit Scooby-Doo, les Pierrafeu, les Jetson, Capitaine Caverne, les Schtroumpfs, ou encore DC Superfriends. En 1984, Margaret rejoint Marvel, où elle occupe le poste de présidente de Marvel Productions, la branche dédiée aux productions télévisées et aux adaptations. Elle sera notamment productrice exécutive sur G.I. Joe ou Transformers, deux licences Hasbro adaptées en bandes dessinées par Marvel Comics, ainsi qu’en dessins animés. En 1990, elle obtient le poste de présidente de Fox Kids, où elle va développer plusieurs franchises très populaires.
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Déjà impliquée précédemment dans les échanges entre Stan Lee et la Toei quant à l’importation potentielle de séries de Super Sentai aux États-Unis, Margaret va lutter bec et ongles aux côtés de Haim Saban pour défendre la licence Power Rangers, en laquelle elle est l’une des rares personnes à croire fermement. Un projet qui sera finalement validé par la Fox, avec le succès et la longévité qu’on lui connaît aujourd’hui, en partie grâce au succès d’une autre initiative de Margaret : X-Men : The Animated Series.
Car, bien qu’elle ait quitté Marvel, Margaret Loesch n’oublie pas pour autant les super-héros de la Maison des Idées, notamment les X-Men, dont elle est une grande amatrice. Déjà productrice d’un épisode pilote intitulé Pryde of the X-Men en 1989, resté sans suite à cause des difficultés financières de Marvel Entertainment, elle décide de commander à Saban et Graz Entertainment une série animée X-Men, dont la première saison compte treize épisodes. Malgré un important retard au lancement, en partie dû à de nombreuses erreurs de la part du studio d’animation sud-coréen AKOM, le cartoon rencontre un succès considérable dès sa première diffusion, en octobre 1992.
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Dans le premier double-épisode de la première saison, “Night of the Sentinels”, le spectateur fait la rencontre de la jeune Jubilee, dont les pouvoirs viennent tout juste de se réveiller. Poursuivie par des Sentinelles, des robots chasseurs de mutants, elle est sauvée par les X-Men de Charles Xavier, des héros costumés qui se battent pour que les mutants soient acceptés. Mise à la porte de son propre foyer par ses parents dépassés, l’adolescente trouve du réconfort auprès de Cyclope, Jean Grey, Tornade, le Fauve, Wolverine, Malicia, Gambit et Morph.
Une équipe dont la composition est très semblable à celle du comic book qui a battu tous les records de vente un an plus tôt, le fameux X-Men #1 de Jim Lee et Chris Claremont. Exception faite de Morph, personnage créé spécialement pour le cartoon, et dont le rôle sera principalement de servir de victime aux scénaristes, car conçu pour être sacrifié dès le début de la série. Un acte fort et audacieux qui donne le ton et la direction de X-Men : The Animated Series. Car, que cela vous semble étonnant ou non, le dessin animé X-Men de la Fox est loin d’être édulcoré en comparaison de la version papier des Enfants de l’Atome.
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Si la violence physique et les armes létales y sont largement restreintes ; Wolverine utilise plus souvent ses griffes comme un moyen de pression que comme une arme ; Cable se refuse à tuer et utilise un fusil laser paralysant, plutôt que mortel ; les thématiques sociales et individuelles abordées n’en sont pas moins sérieuses et d’actualité. Outre les discriminations et le droit à la différence, d’autres sujets sensibles, tels que la religion, la maladie, ou encore la santé mentale, sont évoqués au fil des épisodes. Une maturité qui tranche avec ce que l’on attend habituellement d’un cartoon du samedi matin made in USA, mais qui correspond bien à l'esprit du matériau d’origine et donne une réelle profondeur à cette adaptation animée.
Certains épisodes, centrés sur des membres des X-Men en particulier, enrichissent également de manière inattendue le background des différents protagonistes. C’est spécifiquement vrai pour Malicia ou Gambit, qui deviennent bien plus que des seconds rôles grâce à ces épisodes.
Sans surprise, X-Men : The Animated Series véhicule également, à travers ses multiples trames narratives, un discours politique. Contrôle de la population, lois ségrégatives, et même épuration ethnique, sont au programme du show de la Fox, rappelant toujours le combat des élèves de Xavier pour leur droit à vivre sans avoir à souffrir de leur différence, comme n’importe quel être humain devrait pouvoir le faire. Le message est simple, mais tout à fait clair et compréhensible, même par les plus jeunes.
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Malgré quelques défauts évidents ; dont son animation de qualité très inférieure à ce que les téléspectateurs pouvaient voir dans Batman : The Animated Series, par exemple ; la principale force de la série animée X-Men réside dans la façon dont elle s’inspire avec respect des comics originaux de Marvel, tout en réussissant à proposer une parfaite synthèse de ses influences, facilement accessible à tous les publics.
Si elle pioche dans la galerie de personnages créée par Stan Lee et Jack Kirby, dès le premier numéro du comic book original de 1963, elle condense surtout avec beaucoup d'intelligence les différentes intrigues développées par le scénariste Chris Claremont au cours de son run de seize ans sur la franchise X-Men.
Parmi les principaux arcs et éléments qui nourrissent le scénario du dessin animé, on retrouve Days of Future Past, la Saga du Phénix Noir, l’île de Genosha, les Morlocks, la Terre Sauvage, Mr Sinister, de nombreux ingrédients empruntés au travail de Claremont sur New Mutants, mais aussi les créations d’autres auteurs et autrices, comme Apocalypse, tout droit sorti du X-Factor de Louise Simonson, ou des références à Weapon X de Barry Windsor-Smith.
X-Men : The Animated Series emprunte aussi aux comics contemporains de sa production, en mettant en scène Cable, Bishop, ou encore Gambit dans des aventures connaissant des équivalents quasi-simultanés sur le papier, au point de parfois devancer les événements éditoriaux de la Maison des Idées.
C’est ainsi que le scénario original d’un double épisode de la quatrième saison, intitulé “One Man's Worth”, va sans détour inspirer le mythique crossover mutant Age of Apocalypse, publié par Marvel entre 1995 et 1996.
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À l’inverse, comme pour mieux boucler la boucle, Marvel Comics a proposé une adaptation de X-Men : The Animated Series en comic book entre 1993 et 1997, pour un total de cinquante-trois numéros. Intitulé X-Men Adventures, puis Adventures of the X-Men, cette publication reprend les grandes lignes du cartoon, tout en me paraissant beaucoup moins expurgée des effusions de sang et de la brutalité typiques des 90’s. L’ensemble est plutôt agréable graphiquement, dans la continuité de ce que Marc Silvestri, Jim Lee, ou Andy Kubert ont pu livrer sur les publications X-Men originales.
L’impact de la série animée de 1992 ira bien plus loin, le succès de cette dernière ayant indéniablement poussé la 20th Century Fox a envisager d’acquérir les droits pour une adaptation en live des X-Men, qui sortira en l’an 2000, et dont découlera une saga qui compte plus d’une dizaine de films, si on inclut les opus consacrés à Wolverine.
Son heureuse réussite auprès des plus jeunes fera naître d’autres adaptations animées de comic books Marvel sur le petit écran entre 1994 et 1998 : Spider-Man, Fantastic Four, Iron Man et Silver Surfer ; et provoquera l’expansion massive d’une ligne de jouets chez Toy Biz, qui va proposer, durant toute la décennie 90, de nombreuses figurines venues des publications estampillées “X”, de X-Force à Generation X !
Alors que l’on aurait pu croire ces X-Men sur celluloïd devenus obsolètes face au succès du Marvel Cinematic Universe et rangés pour de bon au fond d’un placard, il n’en est rien !
En 2015, Marvel Comics lance X-men ‘92 qui, à l’image de ce qui peut exister avec Batman ‘66, Superman ‘79 ou Batman ‘89 chez DC Comics, reprend la recette du succès animé à l’écran pour le prolonger sur le papier.
Enfin, en gestation depuis plusieurs années, X-Men ‘97 est une toute nouvelle série d’animation diffusée sur Disney+ à partir de mars 2024, et qui s’impose comme la suite officielle du cartoon de 1992. Une démarche basée sur un fan-service nostalgique, qui n’apportera sûrement rien de nouveau aux Enfants de l’Atome, mais qui témoigne de l’aura que conserve X-Men : The Animated Series malgré le poids des années.
Son générique culte, son excellente utilisation du vaste univers mutant de Marvel, ses héros et héroïnes charismatiques engagés dans une lutte aux enjeux palpables : autant de points forts qui font de X-Men : The Animated Series un dessin animé au rôle capital pour la franchise X-Men. S’il peut être un peu difficile de découvrir cette série aujourd’hui, avec un regard d’adulte, elle reste une excellente porte d’entrée au monde des mutants, somme des qualités propres à cette équipe légendaire.
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