CHRIS - POP CULTURE & COMICS
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ROBOCOP VERSUS TERMINATOR : LA GUERRE DES MACHINES EN COMICS !
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ROBOCOP VERSUS TERMINATOR : LA GUERRE DES MACHINES EN COMICS !

Frank Miller et Walter Simonson chamboulent le futur chez Dark Horse !

Bande dessinée, cinéma, jeu vidéo : il n’est pas rare que les différents courants de la Pop Culture s’entremêlent. Et le sujet qui nous intéresse aujourd’hui en est justement une parfaite démonstration ! Retour sur l’affrontement entre deux icônes de la science-fiction avec Robocop versus The Terminator !

Nous sommes au tout début des années 1990, et je connais alors mes premiers émois vidéoludiques grâce à la Master System de Sega, ma toute première console de salon. Entre deux parties de Alex Kidd in Miracle World et de Sonic the Hedgehog, je joue aussi à un autre soft dont le seul titre provoque immédiatement des étincelles dans le cerveau du gamin fan de monstres et de robots que je suis déjà : Robocop versus The Terminator !
À l’époque, malgré mon jeune âge, j’ai déjà vu les films dont sortent ces deux personnages, et plus d’une fois. Robocop de Paul Verhoeven est sûrement mon film préféré depuis que j’ai quatre ou cinq ans, et Terminator 2 de James Cameron reste pour moi l’un des meilleurs films de science-fiction de tous les temps. Ce que j'ignorais en ce temps-là, par contre, c’est que ce jeu vidéo est l’adaptation d’un comic book sorti en 1992 chez Dark Horse Comics.

La version Mega Drive de Robocop versus The Terminator.

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En 1986, Mike Richardson, tenancier d’une petite librairie spécialisée située dans l’Oregon, attristé par le sort réservé aux auteurs et aux artistes dans le monde de la bande dessinée américaine, décide de fonder sa propre maison d’édition : Dark Horse Comics.
Là où chez Marvel et DC Comics, les créateurs ne sont pas propriétaires de leurs créations, Mike Richardson adopte un modèle économique totalement différent : celui du creator owned, qui permet aux artistes de conserver leurs droits d’auteur et de ne pas finir leur vie dans la misère, spoliés par des éditeurs peu scrupuleux pendant que leurs concepts rapportent des millions au box-office. La revue anthologique Dark Horse Presents, dont cent pour cent des bénéfices reviennent aux auteurs des comic books qui y sont publiés, est un succès inattendu, avec près de cinquante-mille exemplaires vendus pour le premier numéro. Ce petit fascicule mensuel va rapidement servir de vitrine à l’éditeur, et plusieurs séries ou personnages qui y ont fait leurs débuts ont ensuite eu droit à leur propre publication.
Dark Horse Comics parvient à attirer de grands noms et de futurs talents de la bande dessinée comme John Byrne, avec ses Next-Men ; Paul Chadwick avec Concrete ; Mike Mignola avec Hellboy, Alan Martin et Jamie Hewlett avec Tank Girl ; mais aussi et surtout Frank Miller, qui publiera chez l’éditeur des œuvres cultes comme Sin City ou 300, mais aussi ses travaux avec Geof Darrow comme Hard Boiled et Big Guy and Rusty the Boy Robot.

Mais Dark Horse, c’est aussi l’un des pionniers du manga sur le sol américain, avec Lone Wolf and Cub, Dirty Pair ou Ghost in the Shell ; et un éditeur qui va miser très tôt sur des licences en faisant l’acquisition des droits de sagas comme Alien, Predator, Godzilla ou Star Wars, et plus tard Buffy contre les Vampires.
C’est à dessein d’exploiter ces licences qu’en 1989, Dark Horse Comics initie, dans les numéros #34 à #36 de Dark Horse Presents, la première rencontre entre les Xénomorphes d’Aliens et les Yautjas de Predator. L’année suivante marque le début d’une première mini-série intitulée Aliens versus Predator, qui va connaître de nombreuses suites jusqu’à ce que les droits des deux franchises passent chez Marvel Comics en 2020.
Dans une logique de déclinaison de cette recette ayant pour principaux ingrédients les créatures les plus célèbres du cinéma de science-fiction, Dark Horse va organiser une rencontre entre Robocop et Terminator, deux machines de guerre qui viennent de rejoindre le catalogue du Cheval Noir, mais qui n’en sont pas à leur première incursion dans le monde des comics. Le premier a eu droit à une série comptant vingt-trois numéros chez Marvel entre 1990 et 1992 ; le second, à une série de dix-sept épisodes parus entre 1988 et 1990 chez Now Comics.
En 1992, le flic cyborg de Détroit et le robot assassin venu du futur sont à l’apogée de leur popularité et ont tous les deux une actualité bouillonnante : Terminator 2 est sorti au cinéma quelques mois auparavant et Robocop 3 est en préparation. C’est donc un excellent moment pour donner aux fans du monde entier ce qu’ils attendaient peut-être sans le savoir : un duel entre les deux androïdes. Et pour écrire cette histoire, qui de mieux qu’un scénariste de bande dessinée ayant lui-même été impliqué dans la création de Robocop 2 : Frank Miller.

Walter Simonson et Frank Miller à la New York Comic Con 2023.

Au début de la décennie 90, Miller est une figure installée du microcosme des comic books grâce à son travail sur Daredevil, Ronin ou Batman ; et son style mordant et sans concession a déjà fait des merveilles dans une autre histoire de science-fiction sortie chez Dark Horse : Hard Boiled, un thriller cyberpunk caustique dessiné par Geof Darrow, pour lequel le duo va remporter un Eisner Award en 1991.
Pour la partie graphique de Robocop versus the Terminator, on retrouve le dessinateur Walter Simonson, lui aussi déjà unanimement reconnu à l’époque pour avoir enchaîné plusieurs arcs majeurs sur Thor, X-Factor et Fantastic Four chez Marvel Comics.
Cette équipe créative aux talents complémentaires va devoir remplir la difficile mission de mettre en scène un crossover inédit et qui, il faut l’avouer, aurait vite fait de ressembler à un fantasme de geek décérébré où deux robots super balèzes se foutent sur la gueule sans vraiment savoir pourquoi. Heureusement pour nous, ça ne va pas être le cas.

Dans Robocop versus The Terminator, Miller imagine que Skynet, l’intelligence artificielle qui a décidé d’éradiquer l’espèce humaine dans Terminator, trouve ses origines dans la technologie que l’OCP a développée pour donner vie à Robocop.
Suite à cette révélation, Florence, l’une des dernières combattantes de la résistance dirigée par John Connor, traverse le temps et atterrit dans le passé pour éliminer Alex Murphy avant sa transformation. Arrivée trop tard et poursuivie par des T-800 envoyés par Skynet pour protéger Robocop, Flo va découvrir avec étonnement que sa cible n’est pas le monstre qu’elle imaginait. Après avoir sauvé la vie de celle qui a tout abandonné sans retour possible pour le tuer, Robocop va devoir affronter les Terminators.
C’est là que Frank Miller et Walter Simonson vont faire la différence. Plutôt que de se contenter de jouer les arbitres d’un combat entre deux adversaires quasi-indestructibles, ils vont creuser l’esprit torturé de Murphy, fragmenté entre sa part d’humanité et son statut de machine réduite à l’état de simple produit.
Ainsi, Robocop versus The Terminator questionne les lecteurs et les lectrices sur ce qui constitue réellement notre nature humaine, mais aussi sur les dangers de l’intelligence artificielle et sur les dérives possibles d’un système où la justice et l’armée sont automatisées au point d’en devenir hors de contrôle.
Malgré ses thématiques profondes, la mini-série de Dark Horse Comics n’oublie pas d’être spectaculaire : Simonson se fait plaisir en illustrant toutes sortes de Terminators ; du drone au vaisseau spatial colossal, en passant par l’animal de compagnie ; jusqu’à un final qui mise sur une surenchère jouissive et adopte tous les codes du blockbuster.

De Godzilla VS Mighty Morphin Power Rangers à Aliens VS Avengers, en passant par Masters of the Universe / Teenage Mutant Ninja Turtles ou Predator VS Wolverine, on ne compte plus les multiples rencontres entre nos héros préférés dans les pages des comics.
Si Robocop versus The Terminator est plutôt précurseur à l’explosion du genre, il surpasse de loin la majorité des exercices similaires produits par la suite. Premièrement, parce qu’il se sert du lore de chacune des sagas pour établir un point de départ cohérent à son scénario ; et deuxièmement, parce qu’en explorant une dystopie tristement prophétique, le récit de Miller et Simonson est resté très actuel. Avec son rythme impeccable et ses planches détaillées, au découpage aussi précis que frénétique, ce crossover hors-continuité pour les deux franchises se paie le luxe d’offrir du jamais-vu tout en transcendant une formule qui sera souvent copiée, mais rarement égalée.

Très frustré par les retouches apportées à ses scénarios pour Robocop 2 et Robocop 3, Frank Miller adaptera sa propre vision du personnage en comic book chez Avatar Press à partir de 2003, avec l’aide de Steven Grant et Juan Jose Ryp.
Frank Miller’s Robocop est un mélange de bonnes idées, de violence gratuite très sombre et de trucs difficilement transposables à l’écran. Le tout est vraiment solide visuellement, peut-être le plus gros point fort de cette publication qui vise un lectorat bien spécifique.
Robocop et Terminator vont de nouveau se croiser dans une mini-série intitulée Terminator / Robocop : Kill Human, publiée par Dynamite Entertainment en 2011. Cette fois-ci, Robocop devient une pièce de musée tirée d’un long sommeil dans un monde ravagé par Skynet. Une lecture sympa et bourrée de clins d’œil, mais aussi étrangement pessimiste dans l’ensemble.
Enfin, s’il a longtemps été question d’un film opposant Robocop et Terminator, à l’image de ce qui a pu être fait avec Freddy VS Jason ou Alien VS Predator, le projet semble définitivement au point mort. Le jeu vidéo dont je vous parlais en introduction, lui, est resté gravé dans la mémoire d’un noyau dur de fans, si bien qu’il a inspiré quelques figurines fabriquées par NECA ces dernières années.

Robocop versus The Terminator est disponible en français chez Vestron, et c’est un bouquin qui a la particularité d’être vraiment accessible à tous les publics.
Si vous êtes adepte des films, vous ne serez pas perdu et vous passerez un bon moment, même si c’est la première fois de votre vie que vous ouvrez un comic book. Et si vous êtes déjà lecteur ou lectrice de comics, vous allez pouvoir profiter d’une sorte d’OVNI signé par deux légendes de la bande dessinée américaine au sommet de leur art : Frank Miller et Walter Simonson. Et en plus, les quelques bonus présents en fin de volume sont vraiment appréciables. Que des bonnes raisons de vous lancer dans la bataille pour le futur !


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Avec POP CULTURE & COMICS, Chris explore la bande dessinée américaine et ses dérivés dans la culture populaire.